Où est la vérité ? Où est le mensonge ? Où commence la manipulation ? La propagande remplace de plus en plus souvent l’information et met en péril la démocratie. Rappelez-vous les images de faits divers sordides continuellement diffusées sur les chaînes de la télévision française durant la campagne des présidentielles. Mais les maîtres en la matière restent les Etats-Unis ainsi que le démontre, entre autres, Ignacio Ramonet dans Propagandes silencieuses (Folio actuel).
Souvenez-vous, le 12 septembre 2002, Georges Bush déclarait devant l’assemblée générale de l’ONU : "l’Irak entretient des liens étroits avec le réseau terroriste Al-Qaida et menace la sécurité des Etats-Unis parce qu’il possède des armes de destruction massive (ADM)"- une expression terrifiante forgée par ses conseillers en communication. Des accusations qui furent répétées inlassablement pendant plus de six mois afin de convaincre les américains et leurs alliés d’entrer dans cette guerre.
On a appris depuis qu’il n’y a jamais eu ce type d’armes en Irak et l’un des responsables a avoué que la décision de mettre en avant la menace des ADM, pour justifier une guerre "préventive" contre l’Irak avait été adoptée pour des "raisons bureaucratiques" : "Nous nous sommes entendus sur un point, a-t-il précisé, les armes de destruction massive, parce que c’était le seul argument sur lequel tout le monde pouvait tomber d’accord". (1)
Selon Mme Jane Herman, représentante démocrate en Californie, nous serions en présence de "la plus grande manoeuvre d’intoxication de tous les temps". (2)
Ce cas n’est isolé dans l’histoire des Etats-Unis. En 1985, Ronald Reagan, décrète soudain l’ "urgence nationale" en raison de la menace nicaraguayenne que représenteraient les sandinistes au pouvoir à Managua pourtant élus démocratiquement en novembre 1984 et qui respectent à la fois les libertés publiques et la liberté d’expression. « Le Nicaragua, affirme cependant Reagan, est à deux jours de voiture de Hurlingen, Texas. Nous sommes en danger ! ». Le secrétaire d’Etat, Georges Schultz, affirme devant le Congrès : "Le Nicaragua est un cancer qui s’insinue dans notre territoire, il applique les doctrines de Mein Kampf et menace de prendre le contrôle de tout l’hémisphère… " (3). Ces mensonges vont justifier l’aide massive à la guérilla antisandiniste, la Contra, et déboucheront sur le scandale de l’Irangate.
On pourrait multiplier les exemples. Ce qui est scandaleux, c’est de constater qu’un pays qui se présente volontiers comme le champion de la démocratie, comme le champion de la « lutte du bien contre le mal » (sic) utilise des méthodes dignes des régimes les plus détestés du XXème siècle.
Que devient la démocratie dans tout ça ? Un peuple intoxiqué et terrorisé n’est plus un peuple libre. Il devient capable de maintenir au pouvoir celui qui les aura le mieux manipulés alors même que celui-ci aura provoqué la mort de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants.
Il ne reste qu'une chose à espérer, c'est la victoire des démocrates !
(1)Paul Wolfowitz, entretien au magazine Vanity Fair, publié le 30 mai 2003.
(2)Déclaration au journal Libération, 28 mai 2003
(3)Entretien avec Noam Chomsky, Télérama, 7 mai 2003
P.S. Ignacio Ramonet est le rédacteur en chef du Monde diplomatique. Il a également écrit La tyrannie de la communication.