Aurore Gillmann, conseillère régionale PS, représentant la Région au conseil d'administration de l'EPAD, a écrit à M. Chaix, directeur général de l'EPAD, afin de connaître précisément l'état d'avancement des protocoles d'indemnisation des commerçants de La Coupole à La Défense et avoir des informations complémentaires sur les incidents du 30 juillet.
Paris, le 3 août 2010
Monsieur le directeur général,
Je souhaite, par la présente, obtenir certains éclaircissements sur le dossier de la mise aux normes de sécurité et de restructuration du centre commercial de la Coupole dont le conseil d'administration (CA) de l'EPAD a délibéré par question orale le 15 juillet dernier.
De prime abord, je m'étonne que le conseil d'administration n'ait à ce jour pas été rendu destinataire du projet d'avenant au protocole liant l'EPAD à la société Pélican Capital validé par le CA de l'EPAD du 8 juin 2010, censé débloquer rapidement le processus d'indemnisation des commerçants en permettant à l'EPAD de prêter avec intérêt la somme de 3 millions d'euros à Pélican Capital, aux fins de permettre à ladite société de procéder à un début d'indemnisation des commerçants, indemnisation à laquelle Pélican est pourtant tenu contractuellement aux termes dudit protocole.
Le 15 juillet dernier, sans aucun document sur table, vous avez en effet demandé au CA de se prononcer en urgence sur le principe de cet avenant appelé à modifier l'économie du contrat exclusif EPAD-Pélican, en contradiction avec les règles statutaires de l'EPAD telles que prévues par le décret n°58-815 du 9 septembre 1958 modifié créant un établissement public pour l’aménagement de la région dite “de la Défense” dans le département de la Seine.
J'ai pour ma part conditionné mon vote à la transmission expresse de l'avenant acté par le CA dans une confusion certaine, avec l'abstention remarquée de plusieurs représentants de l'Etat. Aussi vous serais-je reconnaissante de bien vouloir procéder à la communication de cet avenant et, le cas échéant, informer le CA des raisons qui empêcheraient sa signature.
En deuxième lieu, je souhaite vous faire part de mon étonnement suite à la lecture de l'ordonnance de référé rendue le 15 juillet 2010, soit le jour même du dernier CA, par le Tribunal de grande instance de Paris suite à l'assignation de l'EPAD par une dizaine de commerçants de la Coupole. Cette ordonnance, outre qu'elle astreint l'EPAD à la réalisation des travaux et le condamne aux dépens, comporte en effet plusieurs éléments troublants.
Le premier touche à la défense de la société AXA France IARD, prise en sa qualité d'assureur de l'EPAD, tendant à faire valoir que « la condamnation de l'EPAD à exécuter les travaux de désamiantage et de mise en conformité » n'a fait « l'objet d'aucune définition préalable, que l'obligation de réaliser les travaux de mise en conformité incombant en totalité à la charge de l'EPAD n'est pas démontrée, que seule l'issue des opérations d'expertise confiées à M. PINCHON permettra de déterminer si la fermeture du centre est nécessaire. »
Selon cette même ordonnance, l'expertise de M. PINCHON, désigné en qualité d'expert à la demande de la société ALLIANZ agissant en sa qualité d'assureur Multirisques de l'EPAD, a été commandée « par ordonnance du 6 octobre 2009 du juge des référés du tribunal de grande instance pour notamment rechercher la présence et la localisation d'amiante, la possibilité de permettre l'accomplissement des travaux de désamiantage dans des conditions ne nécessitant pas la fermeture du centre et de déterminer la solution technique de mise en conformité des réseaux Spinker du centre commercial de La Coupole », mise en conformité ayant motivé l'avis défavorable relatif à la poursuite de l'exploitation rendu par la sous-commission de sécurité chargée de donner son avis sur la conformité de la réglementation sur la sécurité incendie dudit Centre, en date du 5 mars 2010.
Je m'étonne que les assureurs de l'EPAD en aient ainsi appelé à l'attente des conclusions d'une expertise en cours et visant à revenir, le cas échéant, sur le choix envisagé par l'EPAD dès septembre 2007 et validé lors du CA de septembre 2008, à savoir une fermeture totale du site pour restructuration et portage du projet par une société.
Je m'étonne surtout qu'à aucun moment il n'ait été fait mention de cette expertise lors des CA auxquels j'ai assisté depuis mars 2010 et où il a été question du dossier de la Coupole. Une telle information aurait pourtant utilement éclairé le conseil d'administration, en particulier lorsqu'il lui a été demandé d'acter un prêt à Pélican dans des conditions juridiques floues, la demande d'expertise PINCHON émanant directement des assureurs de l'EPAD.
Plus généralement, il semble, dans ce dossier, que l'opportunité des choix opérés par l'EPAD puisse être sérieusement remise en cause. En effet, le juge, par ordonnance du 15 juillet 2010 précitée, a enjoint l'EPAD de « faire effectuer les travaux mis à sa charge par les arrêtés du 18 avril et du 5 mai 2010 (…) dans le mois de la présente ordonnance et sous astreinte de 25 000€ par jour ».
Dix jours à peine avant l'entrée en application des peines d'astreinte ainsi édictées par le juge, voici que des évènements graves contribuent à semer le plus grand trouble et à contrarier l'ordre public sur le site de la Coupole.
Ainsi, la décision du Préfet des Hauts-de-Seine du 30 juillet 2010, évoquée par le Parisien du 1er août 2010 et communiquée sur place par le Commissaire de La Défense aux commerçants, de suspendre les travaux pendant le mois d'août, aurait été suivie d'une altercation violente, ce même 30 juillet, entre une commerçante et des ouvriers venus sur site, malgré la décision préfectorale, poursuivre les travaux et condamner l'un des accès RER de la galerie, ce qui aurait entraîné l'hospitalisation à Suresnes et dix jours d'arrêt de travail de la commerçante, qui porterait aujourd'hui une minerve. Une plainte aurait été déposée contre l'EPAD et l'entreprise de travaux, et les accès auraient été rétablis sur injonction du Commissaire de police.
Les travaux de désamiantage en tant que tels n'ayant pas encore débuté, il ne peut s'agir ici que des travaux de tunnelage préalables, effectués sous la commande exclusive de l'EPAD, et qui depuis plusieurs semaines, érigent des murs face aux vitrines des commerçants de la Coupole, exerçant sur eux une pression psychologique certaine alors que les négociations d'indemnisation sont toujours en cours. D'après les témoins de la scène, des cadres de l'EPAD étaient alors présents lors de la condamnation de l'accès et de l'altercation qui a suivi. Un tel incident, s'il est avéré, serait proprement intolérable et de nature à lourdement engager la responsabilité de l'EPAD.
Par ailleurs, la défense de l'EPAD, telle que reproduite aux attendus de l'ordonnance du 15 juillet, soulève plusieurs questions auxquelles j'aimerais trouver réponse. En effet, l'EPAD a tout d'abord contesté, en vain, son obligation de prise en charge des travaux de remise aux normes, ce qui est étonnant. Partant, le juge a clairement établi que l'engagement de Pelican d'effectuer lesdits travaux renvoyait « à des accords à régulariser dans les plus brefs délais ».
Au vu de ces éléments, il me serait plus qu'agréable de recueillir votre analyse de la situation et les évolutions obtenues et/ou espérées afin de ne pas mettre en péril les finances de l'EPAD, d'assurer l'ordre public, et de permettre l'indemnisation des commerçants. En particulier, j'aimerais connaître l'avancée précise des protocoles d'indemnisation en cours ou signés entre Pélican et les commerçants, en lien avec l'avenant précité dont le principe a été validé par le CA du 15 juillet 2010, précision faite que les protocoles type d'accord d'indemnisation, dont j'ai été rendue destinataire, posent question, notamment au regard des clauses suspensives prévues par Pélican et susceptibles d'empêcher toute indemnisation entière des commerçants avant plusieurs années. Ces clauses me semblant être potentiellement contestables devant le juge, votre analyse juridique à ce sujet me serait précieuse.
Afin d'être pleinement éclairée, je demande, comme je l'ai déjà fait lors du CA du 15 juillet, à disposer des expertises réalisées dont vous avez alors évoqué l'existence, ainsi que des montants des indemnisations actées ou en cours de négociation. J'aimerais également pouvoir disposer de la convention du 24 mars 1986 applicable au site de la Coupole, et du cahier des charges relatif aux locaux commerciaux du quartier Division Leclerc du 17 octobre 1974, documents auxquels l'ordonnance du 15 juillet 2010 fait explicitement référence, ainsi que de l'ensemble des documents soumis au CA sur ce dossier depuis l'origine.
Vous remerciant par avance de l'attention que vous voudrez bien porter à mes demandes, je vous prie de croire, Monsieur le directeur général, en l'expression de mes salutations les plus distinguées.
Aurore GILLMANN Conseillère régionale (depuis mars 2010), Conseillère municipale de Suresnes